Choisir son
verre, c’est choisir son soldat. La palette est infinie.
Quelques conseils
pour que les arômes puissent
se déployer en toute liberté.
Êtes-vous
du genre à voir le verre à moitié vide ou à moitié plein ? Il y a plusieurs réponses
possibles. Que vous soyez d’un naturel pessimiste, optimiste, que vous soyez
pragmatique : il est à moitié vide quand on a commencé à le boire ; à
moitié plein si on le remplit. Ou que vous soyez porté sur les jeux de mots : « Verre plein, je te vide ; verre vide, je te
plains. » Dans la vie de l’amateur de vin, ce dilemme est un faux
problème. Parce qu’un verre de vin à moitié vide est en fait généralement
plein. Les verres remplis à ras bord sont une hérésie, ils annihilent tout
l’intérêt du verre, tout plaisir de la dégustation, jusqu’au goût même du vin.
Le bon niveau est l’épaule du verre. C’est la zone la plus large du calice,
elle détermine le niveau optimal de remplissage, à ne jamais dépasser. La
philosophie n’a pas sa place ici.
Ballon, tulipe, INAO..
Pourquoi l’épaule est-elle si importante ? Parce
que c’est ici que les arômes se déploient le mieux. Plus le verre est épaulé et
plus le vin s’exprimera. Utile pour un vin puissant, fatal pour un vin léger.
En réalité, le véritable dilemme n’est pas de savoir comment
le verre est rempli mais de quel verre il s’agit : un ballon, une tulipe,
un gobelet, un verre INAO ? Et quelle est la hauteur de la cheminée, le
diamètre du buvant, la largeur d’épaule, la taille du pied, la longueur de la
jambe ?
Choisir son verre, c’est choisir son
soldat, son arme pour traquer les
arômes. Le choix est infini, des gigantesques verres à l’américaine aux
minuscules godets des bistrots parisiens. Une cheminée resserrée – la partie
supérieure du verre – concentre les arômes tandis qu’évasée, elle les disperse.
Cela vous semble compliqué ? Nous n’avons pas encore abordé la forme et
le rebord du verre. Plus il est fin et plus le vin semble gagner en
élégance, se posant avec plus de précision sur la langue. Un diamètre réduit
fera filer le
vin vers le fond du palais tandis qu’épaté, il l’étale dans toute la bouche.
Calice ovoïde
On parle du champagne ? Si vous en êtes encore au
débat de la flûte ou de la coupe, vous retardez. C’est le verre à vin au calice
ovoïde qui prime désormais dans les dégustations. Les avis sont en revanche
partagés sur la nécessité d’en ciseler le
fond – c’est-à-dire de le rayer légèrement
–, pour accentuer l’effervescence
et par conséquent la remontée des arômes. Je vous épargnerai les théories sur
la meilleure façon de porter le
calice à la bouche. Tout cela vous semble fumeux ? Testez par vous-même.
Servez un vin identique (ou un champagne) dans trois verres différents, il
s’exprimera selon. Des goûteurs aguerris sont déjà tombés dans le piège,
persuadés qu’ils buvaient plusieurs cuvées.
La veille de la rédaction de cette chronique, invitée
à un déjeuner dans
un restaurant grand chic à deux pas des Champs-Elysées, j’ai vu mon hôte présenter ses
excuses à l’un des invités pour les verres servis. Ils étaient pourtant de
belle facture, fins et élancés. Mais encore trop grossiers pour ce dernier.
L’invité en question était en effet… autrichien. La patrie des plus grands
fabricants de verres à dégustation : Riedel et sa filiale Spiegelau, ainsi
que son concurrent Zalto.
Léger comme l’air
Article du 21 Janvier 2017 Par Ophélie Neiman |
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